Morclose, vous connaissez, vous savez où ça se trouve ? Non? Mais c'est bien normal car cette ville n'existe pas même si sa réalité est transparente. On ne peut pas dire que Desmund Sasse soit né sous les meilleurs auspices et que son parcours ne soit pas semé d'embûches et des sérieuses! Il a écopé de six mois de prison pour des faits dont il n'est pas l'auteur et dès sa levée d'écrou, il retourne en garde à vue, c'est quoi le malaise? Lui qui peut se targuer d'avoir comme ami d'enfance Justin, commandant de police, c'est un peu fort de café. Ce polar aux fragrances "robusta" se déroule sur vingt-quatre heures, c'est dire son rythme affolant. Sur fond de manifs de Gilets Jaunes et de répression policière, notre héros va se retrouver emberlificoté dans un écheveau dont il n'est pas maître et va devoir sauver sa carcasse ou être sauvegardé miraculeusement par une inconnue; ça va à cent à l'heure et c'est superbement écrit, les personnages en dépit pour certains de leur noirceur, sont empathiques et magnifiquement campés, le paysage social est admirablement dessiné et j'aurai pu insérer dans cette chronique des pages entières mais sachons raison garder! Extrait :" Les médecins, les infirmiers, les étudiants, les pousseurs de caddie, les pompiers, les profs, les réacs pour tous, les chauffeurs de taxi, les cheminots, les routiers, les avocats, les écolos, les maires de France, les sans-papiers, les artisans, les collectifs d'usagers de services défaillants, les petits commerçants éreintés, les chauffeurs de bus agressés, les caissières de supermarché épuisées, mal payées, remplacées, les livreurs corvéables à merci, les surveillants de prison poignardés, et les flics même parfois, la grogne s'est métastasée, râle souffreteux d'un corps social malade, d'un organisme qui ne fonctionne plus, mal commandé par une tête qui s'est mise en grève de la pensée pour s'abandonner avec gloutonnerie à son vice naturel et concentrationnaire. Le gâteau a beau grossir, ils sont de plus en plus nombreux à se battre pour une part que chaque réforme réduit un peu plus. Surdité sélective, les doléances des ténors du nouveau féodalisme qui s'instaure sont entendues, surlignées, portées en étendard, sans pudeur ni dignité." Alors voilà, c'est cela aussi que j'aime dans le polar, ce tranchant porté à vif dans les blessures d'un monde à bout de souffle, que les auteurs du genre clament d'une voix puissante, porté par des intrigues impliquant des gens malmenés, ballotés dans un univers glaçant dont ils ne sont que les pions désarmés et désarmants ! Bravo à cet auteur qui est de facto une vrai écrivain et merci à cet autre brillant auteur, Vincent Crouzet, de me l'avoir conseillé!  NSP et je n'en dirai pas davantage!

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