Quelle galerie de personnages, quelle noria de flics emportés par le maelstrom de la violence humaine gratuite, c'est un opus ni plus ni moins que fabuleux. Et cette langue, ce style unique si bien léché qu'il en devient délicieux, roboratif, qu'il en relève davantage du gustatif que de la linguistique! Alors bien sûr, je n'aurais pu constituer cette chronique que d'extraits et peut-être vais-en faire une seconde exclusivement consacré à ces joyaux, après tout, pourquoi pas? Vous connaissez Schneider, ce lieutenant de police revenant au 36 après un long, trop long passage par l'Armée? Ah oui, j'ai omis de vous préciser que nous nous situons vers le début des années soixante-dix et Schneider est précédé d'une aura et recèle un grand charisme : froid, imperturbable, impavide, économe de mots et.......très doué, ses résultats parlent pour lui sauf......quand une toute jeune ado, Betty, est retrouvée massacrée sur un terrain vague. Et là, au-delà de l'émotion à laquelle même le lieutenant et son caractère d'airain ne peuvent guère échapper, c'est toute une équipe qui est emportée, Catala, Dumont, Courapied, Trotsky, Vauthier, dans un entrelacs de doutes. Mais Schneider, c'est un tombeur de crânes, un chasseur des hauts fonds, et ce ne sont pas des petits merdeux, de la mouscaille de banlieue, qui vont lui entraver sa marche vers la vérité. C'est un langage chatoyant, un style élégant, racé, qui accompagne le lecteur tout le long de ces 440 pages de félicité livresque, un feu d'artifice étincelant constitué de perles illuminant leurs écrins ! Ce livre est un monument du polar certes, mais aussi un exemple de roman noir social. Extraits :" L'homme représentait, avec le fatalisme transi, la résignation de tous ces malheureux qui, sans renauder le moins du monde, dociles et muets à jamais, peupleraient un jour le carré des indigents."  "Je suis un sujet que je n'aime guère que l'on aborde en ma présence".  "Dix-neuvième siècle pas mort, par chez nous. Il n'est mort nulle part, les riches et les pauvres, les gens de bien et ceux de rien, à soi seule, la totale inutilité de la première révolution est de nature à dissuader le créateur d'en envoyer une seconde."  "Dieu se tient aux côtés des riches et des puissants, parce ce qu'il sait que ce sont eux qui l'ont mis là où il se trouve et qu'ils n'hésiteraient pas à le virer comme un malpropre au moindre pet de travers."  "Tout comme Dieu, la police est du côré des riches et des puissants, parce que ce sont eux qui remplissent la gamelle."  "A deux grammes sous chaque peupière, le bougre s'enorgueillit d'avoir fait partie de ces nobles défenseurs de l'Occident chrétien qui ont massacré les crouillats dans la cour de la préfecture de police, avant de les foutre dans la Seine à deux pas de là."  Un immense merci aux éditions Rivage, collection Noire, et à Sarah, attachée de presse. Sortie officielle le cinq janvier 2022.

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