C'est un pavé, saignant, un ouvrage fleuve plein de sang et de fureur, c'est notre Histoire, dans ce cas fort peu reluisante, c'est la fin de parcours d'un salaud ordinaire, sartrien, c'est la narration et la divulgation de la noirceur de l'âme humaine, et c'est, tout le paradoxe est là, un fantastique bonheur livresque! Et quelle recherche documentaire, tout simplement fabuleux. Six cent trente pages à couper le souffle, où le lecteur survit, respire, craint avec les héros de cette sombre et sanglante quotidienneté, soumies à la violence , la lâcheté, le mensonge , le vice, la trahison, l'opportunisme, quelle fresque, bon dieu, quelle fresque! Au centre, toujours ce Sadorski, immonde policier sans aucune conviction sauf celle d'obéir aux pires consignes qui soient, sans aucun état d'âme. S'il faut arrêter du Juif , des "crânes" comme il dit dans son langage de brute épaisse, aucun souci, il est d'ailleurs, qu'on se le dise, responsable du "rayon juif", c'est dire! Il y a du Hannah Arendt dans ce magnifique bouquin, où le devoir d'obéissance pose, et c'est un euphémisme, de sérieux problèmes. Oui mais, l'Histoire se retourne et n'est-ce pas toujours ainsi, et les probables vainqueurs se rapprochent dangereusement. Inquiet pour Sadorski : ne le soyez pas car en plus de sa profonde méchanceté, il est incroyablement chanceux, c'en est à désespérer de l'humanité souffrante. Dans cette époque où se pratique avec allégresse la théorie du bordel ambiant, ne risque-t-il pas de passer encore à travers les mailles trop larges du filet?  Extraits : "Les diables immergent leurs victimes dans des baignoires remplies d'eau glacée, frappent les poitrines à en décoller les poumons, broient les testicules entre les plateaux des tables, fendent les verges sous les coups de baguette de cornouiller, cognent sur les reins des heures durant jusqu'à faire jaillir la pisse rouge, brûlent les seins à la cigarette, écrasent les visages devenus informes et méconnaissables, noirs ou couleur de prune bleue, arrachent les ongles, liment les dents, aplatissent les mains sous les presses, brisent les chevilles à coup de talons, forcent à marcher sur des clous de tapisserie, lacèrent les plantes de pied avant de les saupoudrer de sel, pratiquent l'énucléation à la cuiller, insèrent des fils électriques dans les vagins, carbonisent les peaux au chalumeau."  Aucune limite à l'imagination épouvantablement fertile des maîtres de la torture. Et Sadorski, cet ignoble salopard, le retrouverons-nous en dépit des chaos du monde?  Suspense.......................

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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