Quel brio, quelle brillance ! Savez-vous qu'à la lecture de cet ouvrage inoui, je fus contraint pour une première à devoir consulter le dictionnaire pour saisir la signification de plusieurs mots de moi inconnue et celà à moult reprises? Etourdissant, vous dis-je, un vocabulaire d'une rare densité, un art fabuleusement consommé du portrait, la reproduction de trajectoires humaines comme plaquées par un couvercle marmoréen, FATUM, vous avez dit Fatum? Magnifique, sublime, une langue chatoyante pour nous narrer des tragédies de l'impuissance ! Quelle galerie, il y a Samia, bien sûr, la métissée berbère qui étouffe de n'être pas déjà lettrée, fondue de livres, boulimique de lectures, mais aussi Abby, sa meilleure amie et voisine, pourtant si différente, divergente, et puis Soham, fragile, influençable au dernier degré, et puis l'énigmatique "Femme aux Livres", et puis Sabine, caissière épuisée, et puis Sandro, l'alcoolo insatiable, et un adolescent paumé et diabolique, Kevin, et cet univers ghettoisé va goûter aux flammes de l'enfer! C'est un très grand roman noir, d'une teinte obsidienne, emporté par un style éblouissant, à vous faire chuter à la renverse sans aucun rappel envisageable. Et , cerise sur cette merveilleuse friandise, vous lecteur(trice)s ,allez recevoir une fantastique leçon de verlan qui va nécessairement complèter votre culture contemporaine ! Extrait :" Un halo d'effluves nauséabonds cernait sa couche. Son estomac exhalait des gargouillis obscènes que je m'efforçais d'ignorer. Le crevard s'interrompit à nouveau, en proie à une quinte de toux grevée de crachats qui ébranla sa carcasse efflanquée de la tête aux pieds. Des fils de bave sanguinolente suintaient le long de son menton. Les paroles du géronte ne percutaient pas encore mon cerveau." Immense remerciement aux Editions du Caiman et à Jean-Louis Nogaro pour cette splendide découverte. 

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